L'ASPI critique un arrêt récent du Tribunal fédéral relatif aux prestations anticipées en capital résultant de rachats dans des caisses de pension

Selon la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, les prestations en capital résultant d'un rachat dans une caisse de pension ne sont pas autorisées dans un délai de trois ans. Ce principe vient d'être confirmé par le Tribunal fédéral (TF) – à tort selon l'ASIP.

Le Tribunal fédéral a confirmé récemment, dans un jugement daté du 12 mars 2010 concernant l'art. 79b al. 3 LPP, qu'aucun retrait en capital résultant de rachats dans des institutions de prévoyance professionnelle ne pouvait être effectué dans un délai de trois ans (cf. également 2C-658/2009). Depuis le 1er janvier 2006, l'art. 79b al. 3 1re phrase LPP définit le rapport entre le rachat et la prestation en capital subséquente comme suit : « Les prestations résultant d'un rachat ne peuvent être versées sous forme de capital par les institutions de prévoyance avant l'échéance d'un délai de trois ans... »

Une décision du TF « fiscalement motivée »

Bien que le texte soit clair, l'article précité a donné lieu à passablement de discussions depuis son entrée en vigueur. Plusieurs autorités fiscales cantonales font valoir l'opinion selon laquelle aucune prestation en capital partielle ne devrait plus être possible dès lors qu'un avoir de vieillesse existant au moment du rachat est également soumis à la période de blocage de trois ans. Dans ce cas, elles présument qu'il y a évasion fiscale. Cette position est massivement critiquée par les cercles de prévoyance mais clairement défendue dans l'arrêt précité.

A tort, de l'avis de l'Association suisse des Institutions de prévoyance ASIP. Selon elle, si le Tribunal fédéral devait s'en tenir à cette jurisprudence, cela n'irait pas sans avoir de lourdes conséquences pour la prévoyance professionnelle et les assurés. De plus, l'association estime que l'interprétation faite par la haute cour des dispositions concernant le rachat est unilatérale et motivée uniquement par des considérations fiscales. Cette interprétation contredirait également l'intention du législateur de créer une base unifiée pour la prévoyance professionnelle et aurait pour conséquence de dissuader les assurés de procéder à des rachats. D'autant plus que les autorités fiscales auraient, elles aussi, qualifié à tort les prestations anticipées d'encouragement à la propriété du logement et les paiements en espèces comme des prestations en capital, et les auraient, par conséquent, également soumis au délai légal de trois ans.

Selon l'ASIP, cet arrêt contredit à la fois la législation, la lettre de la loi, l'interprétation de l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et la pratique dominante en matière de prévoyance professionnelle. Elle porterait ainsi atteinte à la sécurité du droit.

L'ASIP encourage les institutions de prévoyance à ne pas modifier leur pratique

Compte tenu du fait que le Tribunal fédéral est en tout temps susceptible de corriger sa jurisprudence, une interprétation de l'art. 79b al. 3 LPP conforme au texte de la loi se justifie, estime l'ASIP. L'arrêt en question est à ce point problématique et motivé uniquement par des considérations fiscales que l'ASIP ne voit aucun motif de s'écarter de la pratique actuelle, jusqu'à une prochaine décision du Tribunal fédéral.

Partant, l'ASIP recommande qu'en tant qu'institution de prévoyance, nous informions expressément nos assurés sur la nécessité de s'assurer eux-mêmes auprès des autorités fiscales compétentes de la déductibilité fiscale du montant du rachat. Cela devient d'autant plus important à mesure que le rachat se rapproche du moment prévu du départ à la retraite. Dans beaucoup de relations de prévoyance, les circonstances particulières du rachat doivent être considérées séparément. Les versements en capital après l'expiration du délai de trois ans à compter du rachat ne présentent, quant à eux, pas d'inconvénient particulier.